Vidéo Transferts

Date : 
2001

Il s’agit sans doute là d'un des films les plus étonnants que j’ai réalisés en maison d’arrêt. Une caméra vidéo sert de boîte aux lettres entre un groupe de détenus et une classe de terminale d’un lycée bordelais qui découvre la philosophie.

Le film démarre de façon abrupte. Les lycéens sont d’abord fascinés par le discours terriblement transgressif des prisonniers qui en appellent à une soif de liberté extrême pour justifier leurs actes. Le dialogue s’engage avec une sincérité déconcertante. Personne ne mâche ses mots et la rudesse des propos des uns et des autres laisse parfois place à des moments tendres.

Petit à petit, au travers d’une émotion grandissante, Vidéo transferts connaît différents rebondissements jusqu’à un étonnant final, la « confession » qu’un détenu livre à notre caméra.

Ce film a considérablement transformé ceux qui y ont participé. Les lycéens ont « humanisé » les détenus. Ils diront à ce sujet « nous savons maintenant qu’ils ont une âme ». Ils ont aussi tourné un miroir vers les détenus. Loin des institutions juridiques, les prisonniers ont accepté de se regarder en face.  

Vidéo-Transferts est un projet charnière. D'une part, c'est un véritable film d'atelier qui possède une authentique dimension de documentaire ( il entremêle les notions de justice, d’enfance, de société, de transgression... ) d'autre part, il entrouvre la porte à d’autres types de travail d’ateliers artistiques en milieu social. Enfin, les pistes de lecture de ce projet sont multiples : sociologiques, psychanalytiques etc.

Ce film a été présenté à différentes reprises dans des lycées, des cinémas d’arts et d’essais, des maisons d’arrêt, des centres de détention. La qualité de son propos aurait pu lui donner une belle vie dans des festivals.  Malheureusement, la maison de production n'a jamais réussi à obtenir de la pénitentiaire les autorisations nécessaires à sa diffusion.